Crise au mouvement Attac. Peleas entre burócratas de Attac Francia

23.Sep.05    Análisis y Noticias

L’engagement d’Attac dans la campagne en faveur du «non» à la
Constitution européenne a amplifié la polémique qui anime le mouvement
depuis de longs mois et qui concerne le positionnement de l’organisation
dans le débat politique. Sept ans après sa création, Attac doit-elle devenir
un parti au sens classique du terme ? Doit-elle même apporter son soutien,
avec d’autres associations, syndicats, formations politiques, à un
alter-candidat pour la prochaine élection présidentielle ? Pour le président
d’Attac, Jacques Nikonoff, la réponse est non. Mais sa position fait d’
autant moins l’unamité au sein de l’association qu’il est lui-même l’objet
des critiques les plus vives et que ses méthodes de gestion du mouvement
sont totalement remises en cause. Notamment par le collège des fondateurs d’
Attac.

Attac est entrée dans une zone de turbulences. L’association phare de
l’alter-mondialisme doit faire face à la fois à une crise existentielle et à
une fronde interne. Les universités d’été, organisées en août à Poitiers,
ont d’ailleurs donné l’occasion aux tensions qui règnent au sein de l’
association de s’exprimer publiquement. Le président d’Attac, Jacques
Nikonoff, y a subi les assauts de ses opposants qui critiquent vivement ses
méthodes autoritaires et sa volonté de centraliser la direction du
mouvement. Mais au-delà des reproches personnels adressés à un homme et à
une équipe, c’est aussi un désaccord profond sur la place de l’association
dans le paysage politique qui a émergé de ces affrontements.

Que doit Attac devenir sept ans après sa création ? Trublion ou acteur
politique ? Mouvement ou parti ? Né d’un courant d’idées dénonçant les
injustices de la mondialisation, Attac a suscité l’engouement de tous ceux,
en France et dans le monde, qui refusaient la fatalité du marché et
dénonçaient les injustices sociales. Ce créneau alternatif a été
particulièrement porteur. A tel point qu’Attac a réussi à devenir
incontournable dans le débat d’idées et que le poids de ses 30 000 adhérents
en a fait un objet de convoitises pour les acteurs politiques traditionnels.

Un candidat en 2007 ?

C’est dans ce contexte qu’Attac s’est lancée dans la bataille du
référendum sur la Constitution européenne. A fond pour le «non», l’
association a fait cause commune avec des mouvements de gauche (Parti
communiste, Ligue communiste révolutionnaire) et des syndicats (CGT, Sud).
La participation active d’Attac au succès remporté dans cette élection a
contribué à poser plus clairement la question du positionnement du mouvement
dans le débat politique. Avec comme corollaire celles de l’organisation de l
’association et des alliances.

Pour certains membres d’Attac, un engagement actif dans le jeu
politique représente le meilleur moyen d’exploiter l’élan de la victoire du
«non» à la Constitution européenne et de peser véritablement dans le
mouvement social. Du coup, l’idée de soutenir, avec l’ensemble de la gauche,
un candidat à l’élection présidentielle a germé dans les esprits. Cette
hypothèse a progressé d’autant plus facilement que l’association dispose d’
une personnalité médiatique adéquate en la personne de José Bové, l’ancien
porte-parole de la Confédération paysanne qui s’est notamment illustré par
son combat contre les OGM et a la capacité d’être le représentant de la
cause altermondialiste face aux caciques de la politique.

L’actuel président, Jacques Nikonoff, et son prédécesseur, Bernard
Cassen, rejettent cette option. Pour eux, il n’est pas question de soutenir
qui que ce soit en 2007. La direction d’Attac a d’ailleurs diffusé un
communiqué pour couper court aux spéculations en précisant que l’association
«ne veut pas devenir un parti politique et qu’elle ne soutiendra personne à
l’élection présidentielle». De leur point de vue, Attac doit rester «un
mouvement d’éducation populaire».

Bizarrement, c’est cette direction qui rejette l’idée de voir l’
association devenir un parti que ses détracteurs internes accusent de
mettre en œuvre des méthodes de gestion totalement calquées sur celles des
formations politiques centralisées. Le collège des fondateurs, c’est-à-dire
l’instance qui regroupe les représentants des organisations syndicales qui
ont créé le mouvement, met en cause l’actuel président et refuse sa
proposition récente de réforme du mode de désignation du conseil d’
administration qui prévoyait la consultation directe des membres de l’
association. Il l’accuse de tenter par ce moyen de confisquer totalement le
pouvoir aux adhérents et plaide, pour sa part, en faveur d’une meilleure
représentation des comités locaux ainsi que de la mise en place d’une
direction collégiale. Et pour contrecarrer les ambitions de Nikonoff, il a
adoubé un candidat concurrent à la présidence, l’économiste Jacques Cossart.

Cette irréductible opposition a abouti à renvoyer à plus tard la
nomination du nouveau conseil d’administration prévue à l’origine pour
décembre lors de l’assemblée générale du mouvement. Une décision que Jacques
Nikonoff a expliqué en déclarant que «la réflexion demande d’autant plus de
temps que des divergences d’orientation se sont manifestées». Autant dire
que l’avenir d’Attac n’est pas encore scellé.

Valérie Gas